Le logement en crise(s)
« Dis-moi où tu habites, je te dirai qui tu es… » : l’adage est plus que jamais de circonstance. Alors que la crise sanitaire se traduit par un mouvement de transhumance – dont il est encore trop tôt pour juger de l’ampleur – des villes capitales pour les villes dites moyennes, les Français font de leur domicile une part de leur identité.
À l’échelle des territoires, certains urbains lassés prennent fait et cause pour l’ailleurs. Un ailleurs qui rime avec campagne ou rivage, consacrant deux tendances empruntées à nos aînés : l’héliotropisme et le biophilisme. Comme il est étrange, ce basculement de discours après des années de glorification du phénomène de métropolisation et de ses vertus économiques, sociologiques, écologiques. Il aura suffi d’une épidémie mondiale pour que quelques Parisiens en mal de verdure plient bagage pour d’autres contrées plus propices à leur quête de sens et ne rêvent que de jardin à arroser, de potager à cultiver, ou de piscine à filtrer. Où est donc passée notre conscience écologique qui prônait la densité, la mixité et la fin de l’artificialisation nette?
À l’échelle des usages, après les expériences plus ou moins réussies de télétravail, les Français découvrent que leur logis est finalement trop exigu, trop inadapté, trop impropre à la multifonctionnalité. Une petite musique se fait même jour sur la piètre qualité des logements en France. Ils sont surtout trop chers, car à force de contraindre l’offre de diverses manières, on en arrive à des aberrations économiques. Alors que les cœurs des métropoles se vident – paraît-il –, les prix et les loyers poursuivent leur course folle, contraignant, excluant et empêchant des pans entiers de la population d’avoir accès au plus essentiel des droits : avoir un toit sur la tête.
Cette configuration schizophrénique n’aura pas laissé de marbre les investisseurs, quelle que soit leur faconde. Produit hier honni pour sa complexité de gestion et ses barrières à l’entrée, le logement redevient l’actif préféré des zinzins qui se rachètent, par la même occasion, plus qu’un patrimoine… une bonne conscience. Mais le retard accumulé par les pouvoirs publics dans la construction conjugué au dédain exprimé pendant des décennies par les allocataires d’actifs à l’égard du résidentiel pousse littéralement le logement au bord de la crise de nerfs.
Sandra Roumi, président et directrice de la publication
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