Éditorial / De l’îlot au code-barres
Depuis plusieurs décennies on assiste à l’inexorable déclin de l’intervention de la puissance publique sur l’espace urbain. Des pans entiers de nos villes sont insidieusement privatisés. La conception d’îlots et de quartiers, voire de gigantesques cités de loisir planifiées sur des terres agricoles, est désormais prise en charge par le secteur privé. Des grands groupes d’investisseurs et de promoteurs redessinent ces territoires selon leurs critères de rentabilité, les gèrent et les contrôlent selon leurs règles. Cette mutation pose de graves questions politiques, notamment sur la légitimité démocratique de telles décisions. Ces interrogations n’ont jamais véritablement fait débat et seule une minorité de professionnels – architectes, urbanistes, paysagistes – semblent s’en inquiéter.
Mais privatisation n’est pas obligatoirement synonyme d’urbanisme générique ou réactionnaire. Avec le
développement rapide du commerce sur Internet, les grandes enseignes s’inquiètent fort justement de la perte d’attractivité de leurs magasins. Après avoir siphonné les consommateurs des centres-villes et les avoir attirés dans les centres commerciaux en périphérie, certains redécouvrent les potentialités urbaines des grands îlots. Qui aurait cru que ces blocs rendus impénétrables, cloisonnés et digicodisés puissent à nouveau s’ouvrir au flux des piétons et à d’autres usages comme ils le furent autrefois ? Nous avons choisi de vous présenter plusieurs de ces projets récemment livrés ou en cours de l’être : l’Hôtel-Dieu à Lyon, La Samaritaine, l’îlot Sainte-Croix ou l’îlot Beaupassage à Paris. La réhabilitation d’ensembles immobiliers des années 1970, comme la tour Sunflower à la gare de Lyon, en s’ouvrant à nouveau sur leur environnement urbain, témoigne également de ce nouvel intérêt des maîtres d’ouvrage pour une ville ouverte, complexe, consciente de la richesse des sédimentations de son passé. Mais ce renouveau par un commerce qui s’adresse aux plus nantis ne renforce-t-il pas, malgré ses vertus, la ségrégation sociale qui menace tant nos métropoles ?
Emmanuel Caille
Depuis plusieurs décennies on assiste à l’inexorable déclin de l’intervention de la puissance publique sur l’espace urbain. Des pans entiers de nos villes sont insidieusement privatisés. La conception d’îlots et de quartiers, voire de gigantesques cités de loisir planifiées sur des terres agricoles, est désormais prise en charge par le secteur privé. Des grands groupes d’investisseurs et de promoteurs redessinent ces territoires selon leurs critères de rentabilité, les gèrent et les contrôlent selon leurs règles. Cette mutation pose de graves questions politiques, notamment sur la légitimité démocratique de telles décisions. Ces interrogations n’ont jamais véritablement fait débat et seule une minorité de professionnels – architectes, urbanistes, paysagistes – semblent s’en inquiéter.
Mais privatisation n’est pas obligatoirement synonyme d’urbanisme générique ou réactionnaire. Avec le
développement rapide du commerce sur Internet, les grandes enseignes s’inquiètent fort justement de la perte d’attractivité de leurs magasins. Après avoir siphonné les consommateurs des centres-villes et les avoir attirés dans les centres commerciaux en périphérie, certains redécouvrent les potentialités urbaines des grands îlots. Qui aurait cru que ces blocs rendus impénétrables, cloisonnés et digicodisés puissent à nouveau s’ouvrir au flux des piétons et à d’autres usages comme ils le furent autrefois ? Nous avons choisi de vous présenter plusieurs de ces projets récemment livrés ou en cours de l’être : l’Hôtel-Dieu à Lyon, La Samaritaine, l’îlot Sainte-Croix ou l’îlot Beaupassage à Paris. La réhabilitation d’ensembles immobiliers des années 1970, comme la tour Sunflower à la gare de Lyon, en s’ouvrant à nouveau sur leur environnement urbain, témoigne également de ce nouvel intérêt des maîtres d’ouvrage pour une ville ouverte, complexe, consciente de la richesse des sédimentations de son passé. Mais ce renouveau par un commerce qui s’adresse aux plus nantis ne renforce-t-il pas, malgré ses vertus, la ségrégation sociale qui menace tant nos métropoles ?
Emmanuel Caille