L’Architecture d’Aujourd’hui n°444 — Philippe Starck, rédacteur en chef invité
« Une maison ne doit pas coûter plus cher qu'une voiture ». Philippe Starck, rédacteur en chef invité du n°444 de L'Architecture d'Aujourd'hui, a choisi d'explorer le sujet de l'industrialisation du logement car, dit-il, « le monde de la construction doit se nettoyer, revenir de ses avidités, ses narcissismes et retrouver la nécessité qui consiste à donner un toit aux gens qui sont en train de nourrir une démographie galopante. »
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ÉDITORIAL
Emmanuelle Borne, rédactrice en chef de L’Architecture d’Aujourd’hui
Une fois par an depuis trois ans, L’Architecture d’Aujourd’hui invite une personnalité extérieure à endosser le rôle de rédacteur en chef. Nous avons fait le choix, dès le départ, d’adresser cette invitation à des créateurs d’horizons divers pour varier les sujets autant que les approches. Après l’architecte Marc Barani en 2019 et l’artiste Tadashi Kawamata en 2020, AA a sollicité un designer, et pas des moindres, le père du design démocratique : Philippe Starck. Et nous n’avons pas été déçus : alors qu’on l’attendait sur ce sujet-là, il a choisi de s’aventurer en terre bien connue des architectes, celle de l’industrialisation de la construction, et plus précisément de la maison. Un sujet qui nous était, à dire vrai, familièrement étranger. À l’heure où la réhabilitation apparaît – enfin ! – comme une nécessité de plus en plus pressante, la préfabrication, la construction hors site, le modulaire, ne sont-ils pas secondaires tant ils sont associés à la construction neuve ? Autrement dit à plus de matière, plus de dépense d’énergie, et aussi, le croyait-on, à un marché où les impératifs de l’industriel semblent l’emporter sur le savoir-faire de l’architecte. Publié en janvier 2021 pour le ministère chargé du Logement, le rapport Michel-Rivaton sur « L’industrialisation de la construction » souligne « l’opportunité » que représente le hors-site – « préfabrication à laquelle s’ajoute une dimension industrialisée de l’assemblage sur site et sur le transport de la production au site » – pour le secteur de la construction. Parmi les atouts relevés : la réduction des coûts, celle des délais grâce à la production et à l’assemblage en usine (80 à 85 % des travaux pourraient être réalisés en usine contre 10 % aujourd’hui), la réduction des nuisances de chantier, la meilleure maîtrise du coût carbone d’un projet, etc. Autant d’arguments qui, pour autant qu’ils soient convaincants – les réalisations présentées dans ce numéro, choisies avec Philippe Starck, l’illustrent – ne balaient pas trois questions majeures : l’Histoire, dont celle des Trente Glorieuses, n’a-t-elle pas déjà montré les limites du modèle ? Faire avec le « déjà-là » n’est-il pas plus urgent ? Quelle place pour l’architecte ? Christine Leconte, récemment élue à la tête de l’Ordre des architectes, apporte, dans un récent entretien avec AA, quelques éléments de réponse : « Il faut regarder l’histoire pour ne pas refaire les mêmes erreurs. Une approche prudente s’impose, mais elle ne doit pas empêcher l’innovation. Construire hors site ne veut pas dire construire standard. Si on veut défendre la qualité, d’usage, spatiale, on va devoir s’atteler au sujet, qui ne doit pas être décorrélé de l’existant. Sinon le hors-site existe déjà, cela s’appelle Algeco », dit-elle. Il est une autre référence, qui est celle de Philippe Starck : l’héritage de Jean Prouvé. Et quand, appelant à l’oeuvre de l’auteur de la Maison des Jours Meilleurs, le designer français nous propose de changer de focale, en plaidant non pas pour que l’habitat ne soit plus considéré comme un produit, mais bien comme un produit méritant d’être envisagé dans le cadre d’un processus d’industrialisation de qualité pour justement s’opposer « aux constructeurs-voleurs qui ruinent ceux qui achètent ces objets imposteurs », alors nous embarquons avec lui pour regarder si il n’y a pas là une piste vers des jours meilleurs.
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AU SOMMAIRE :
● crypto-art et NFT (non fungible tokens), enquête de Philippe Tretiack
● hommage, copie ou contrefaçon dans le design, l’analyse de Marie Godfrain
● les maisons de Philippe Starck, portrait par Maryse Quinton
● Philippe Starck dénonçant les constructeurs-voleurs, manifeste
● la vente de maisons par correspondance, histoire du catalogue Sears par Stephen Zacks
● l’impression 3D au service de la démocratisation du logement, article de Christine Desmoulins
● construire mieux et moins cher, enquête de Valérie de Saint-Do
● des abris mobiles aux Pays-Bas par Caspar Schols ; une crèche démontable à Paris par Djuric Tardio Architectes ; une tour de logements modulaires à New-York par nArchitects ; un théâtre en bois à Lausanne par Yves Weinand architecte et l’Atelier Cube
● et beaucoup d'autres surprises.
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